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Comment le froid nous enrhume?


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Informer
Biais
Aucun, c'est que de la science
Validité
Tant que les virus ne muterons pas de trop.


Illustration - Comment le froid nous enrhume?

Flemme de lire :



Je me souviens encore de ma mère m’enjoignant de mettre un bonnet et une écharpe pour sortir l’hiver : « Couvre-toi bien, sinon tu vas attraper froid ! ». Dans l’imaginaire collectif, le froid cause nos rhumes. Mais est-ce vraiment le cas ?

Pour qu’on tombe malade, il faut qu’un microbe (virus ou bactérie) réussisse à infiltrer notre système respiratoire et déjoue nos défenses immunitaires. En clair, avoir froid ne crée pas un virus spontané dans notre nez (ouf).

Par contre, le froid peut jouer les complices des virus. Plusieurs phénomènes hivernaux se conjuguent pour nous rendre plus vulnérables aux infections en hiver :

  • On hiberne (tous ensemble). Quand il fait froid, on se calfeutre dans des espaces clos, mal aérés, tous ensemble (les joies du métro bondé ou de la salle de classe en hiver !). Résultat, un virus qui traîne profite de ces regroupements pour passer de personne en personne. C’est l’une des principales raisons pour lesquelles les épidémies de rhume, grippe & co fleurissent chaque hiver.

  • Les virus adorent le froid. Eh oui, contrairement à nous, de nombreux virus survivent mieux quand il fait frisquet. Les températures basses et l’air sec augmentent la stabilité des virus dans l’air et sur les surfaces, ralentissant leur dégradation naturelle. Par exemple, le virus de la grippe se propage plus facilement par temps froid et sec. Une étude de l’Inserm résume bien la situation : en hiver, le climat froid et le manque d’humidité favorisent la transmission (virus plus stables) et le manque de soleil réduit notre vitamine D, affaiblissant un peu nos défenses. En plus, on se colle les uns aux autres, ce qui n’arrange rien.

  • Notre nez se défend moins bien. L’air froid qui s’engouffre dans nos narines peut affaiblir les défenses immunitaires locales de la muqueuse nasale. Des chercheurs ont découvert en 2022 un mécanisme intéressant : quand la température à l’intérieur du nez chute de quelques degrés (par exemple en respirant de l’air à 4°C dehors), les cellules de la muqueuse nasale produisent moins de vésicules extracellulaires antivirales (sortes de mini “bombes” qui neutralisent les virus). Dans leur expérience, un nez refroidi de 5°C libérait 42% de vésicules en moins, et les virus (deux rhinovirus et un coronavirus testés) s’y multipliaient deux fois plus. (Gloups.) Autrement dit, un coup de froid dans les narines réduit l’efficacité du bouclier antiviral local, laissant plus de chance aux virus de s’installer. C’est tout frais comme découverte, et ça vient un peu donner raison à nos mamans : avoir le nez glacé pourrait bien faciliter l’infection.

  • Le stress et la vasoconstriction. Avoir froid, surtout très froid, c’est un stress pour le corps. Il réagit en sécrétant des hormones du stress (cortisol, adrénaline) qui, sur le long cours, peuvent freiner l’immunité en bloquant certains médiateurs de nos défenses. De plus, le froid cause une vasoconstriction des vaisseaux sanguins périphériques. Au niveau du nez, cette diminution du flux sanguin pourrait réduire l’afflux de globules blancs sur place, et donc la capacité à éliminer un intrus viral. Ce mécanisme est souvent évoqué pour expliquer pourquoi un nez refroidi devient une cible facile. Moins de sang = moins de soldats immunitaires sur le front nasopharyngé.

Alors, le froid est-il innocent ? On peut conclure que le froid seul ne te rend pas malade, il faut bien un virus pour déclencher un rhume. Mais le froid crée des conditions favorables pour le virus : il prolonge la vie des virus autour de nous, il nous regroupe dans des endroits fermés, et il affaiblit un peu les boucliers de notre nez. C’est un peu comme un complice de crime : sans virus, pas de rhume, mais avec le froid, le virus a un allié de choix. D’où l’impression tenace qu’on “attrape un rhume parce qu’il fait froid”.

Éternuement Un éternuement propulse un cône de gouttelettes contaminées dans l’air, d’où l’importance de couvrir sa bouche et son nez !

Si je reste bien au chaud, j’évite d’être malade ?

On pourrait se dire : “OK, le froid aide les virus. Donc je n’ai qu’à rester bien au chaud et j’échapperai à tous ces rhumes !”. Hélas, ce serait trop simple. Bien que se tenir au chaud soit effectivement mieux pour ton corps (on ne va pas recommander de se rouler dans la neige en t-shirt 😅), cela ne garantit pas que tu n’attraperas pas de virus.

D’abord, on l’a vu, l’infection dépend surtout de l’exposition au virus. Si tu restes dans une pièce chauffée mais non ventilée avec trois enrhumés qui postillonnent, tu risques fort de repartir avec un souvenir viral, même si tu portes trois pulls. À l’inverse, tu peux très bien faire une balade dans le grand froid bien couvert sans choper quoi que ce soit si aucun virus ne croise ta route. Le contact avec le virus est le facteur décisif.

Ensuite, ton état de santé général joue un rôle. Quelqu’un en pleine forme, bien reposé, aura des défenses immunitaires plus efficaces pour repousser un virus, même s’il a un peu froid. À contrario, si tu es fatigué, stressé, ou immunodéprimé, tu peux tomber malade même sans coup de froid : le virus trouvera un terrain affaibli et s’installera. C’est pour ça qu’on insiste sur les bonnes habitudes de vie (sommeil, alimentation) – j’y reviens plus bas.

Être au chaud aide tout de même à ne pas affaiblir inutilement ton immunité. Si tu te balades en plein vent glacial sans manteau, tu infliges un stress à ton corps (coucou cortisol) qui peut momentanément te rendre plus vulnérable. Donc oui, mieux vaut éviter d’avoir froid pour ne pas donner d’opportunité aux virus. Mais ce n’est pas une armure magique : tu peux très bien attraper la grippe bien au chaud chez toi parce que ton enfant l’a ramenée de l’école.

À noter aussi : nos aînés avaient l’intuition de choses vraies. Par exemple, éviter les courants d’air ou se protéger la gorge avec une écharpe, c’est surtout pour que tes muqueuses ne se refroidissent pas trop vite. Un changement brutal de température (le fameux coup de froid) peut dérégler momentanément les réflexes de défense de ton nez/gorge, comme on l’a vu. Donc se couvrir, ça aide à maintenir ton corps à température optimale, ce qui est bon pour l’immunité en général. Mais cela ne tue pas les virus et ne les empêche pas d’entrer si tu y es exposé.

Comment se protéger des maladies de l’hiver ?

Bon, on ne peut pas contrôler la météo ni vivre dans une bulle stérile. Mais il existe plein de moyens de réduire les risques d’attraper ou de transmettre ces satanés virus hivernaux. Voici les gestes simples et habitudes à adopter pour passer l’hiver en limitant la casse :

  • Lave-toi les mains régulièrement ! C’est tout bête, mais ultra efficace. La majorité des virus de l’hiver se transmettent par les mains et les objets contaminés autant (sinon plus) que par l’air. Un malade se mouche, touche une poignée de porte, tu touches la poignée puis ton nez… et voilà. Donc savon et eau chaude pendant 30 secondes, surtout après s’être mouché, avoir toussé, être allé aux toilettes, et avant de manger ou de se toucher le visage. C’est le réflexe numéro 1 pour éviter la contamination, dixit l’OMS. (Le gel hydroalcoolique dépanne aussi, mais il élimine pas tous les microbes et marche moins bien si tes mains sont sales visiblement.)

  • Évite de te toucher le visage. Plus facile à dire qu’à faire (on le fait des dizaines de fois par heure sans s’en rendre compte). Mais c’est par les muqueuses (yeux, nez, bouche) que les virus entrent. Si tes mains ont chopé des virus sur le bus ou le clavier, ne pas les porter à ton nez/yeux peut t’éviter de les inviter à l’intérieur. Astuce : si ça gratte, utilise un mouchoir propre plutôt que tes doigts.

  • Aère les pièces tous les jours. Ouvre grand les fenêtres 5-10 minutes, même s’il fait froid (tu remettras le chauffage après). Pourquoi ? Parce que dans un air confiné, si un virus est présent, sa concentration augmente et tu finis par le respirer. Un bon renouvellement d’air disperse et diminue la charge virale en suspension. C’est un geste souvent oublié en hiver (on a peur de refroidir la maison), mais aérer chasse les microbes et l’air vicié. Au travail aussi, penser à ouvrir la salle de réunion après le meeting plein de renifleurs, ça peut sauver quelques collègues.

  • Éternue et tousse dans ton coude (et pas dans tes mains 😅). On l’a vu plus haut, un éternuement projette un panache de gouttelettes contaminées jusqu’à plusieurs mètres. Si tu mets ta main devant ta bouche, tu protèges certes les autres à l’instant T, mais tu enduis ta main de virus que tu vas répandre partout ensuite. Le pli du coude, lui, a peu de chances de toucher d’autres surfaces. Adopte le réflexe Dracula 🧛 (le coude devant le visage) pour piéger ces gouttelettes dans ta manche. Et utilise des mouchoirs jetables pour te moucher, puis poubelle directe ! (Évite les mouchoirs en tissu, sinon c’est un doudou à virus que tu gardes sur toi).

  • Salue sans serrer la main ni faire la bise en pleine épidémie. On l’a bien appris depuis 2020 : un check du coude ou un petit signe de la main, ça évite de s’échanger des microbes. La bise, aussi sympathique soit-elle, est un moyen royal de choper le virus de Tata Jacqueline 😘. Idem pour le serrage de paluches au bureau – quand la moitié de l’open space est malade, on peut temporairement passer en mode “salut de loin”. Personne ne le prendra mal, promis.

  • Porte un masque si nécessaire. Bon, on ne va pas se masquer H24 dès novembre, mais dans certaines situations c’est judicieux. Si tu présentes des symptômes (toux, rhume) et que tu dois côtoyer des personnes fragiles (personnes âgées, femmes enceintes, nourrissons, immunodéprimés), mets un masque chirurgical. Ça retient la majorité de tes projections virales. Inversement, si un proche est malade, tu peux aussi porter un masque pour te protéger quand tu es près de lui (et lui en mettre un s’il l’accepte). On a vu avec le covid que le masque, même imparfait, réduit clairement les transmissions de virus respiratoires. Ce n’est plus obligatoire, mais ça reste un outil de prévention à ne pas oublier au besoin.

  • Évite le partage d’objets à risque. Verres, couverts, brosses à dents (sait-on jamais 😂)… tout ce qui touche la bouche et le nez peut transmettre des virus. Par exemple, pas de bise avec le même mouchoir (oui ça paraît logique…), évite de boire dans la même bouteille qu’un pote en plein hiver, etc. Avec les enfants, attention aux jouets passés de bouche en bouche à la crèche – un vrai bouillon de culture ! Nettoyer régulièrement les objets fréquemment touchés (téléphone, poignées de porte) peut aussi aider, car les virus peuvent survivre plusieurs heures sur les surfaces. Un petit coup de lingette désinfectante si quelqu’un de malade est passé par là, ça peut pas faire de mal.

  • Entretiens ton système immunitaire. Le meilleur bouclier reste ton propre corps quand il est en pleine forme. Alors on sort les recettes de grand-mère qui ont fait leurs preuves : bien dormir (le manque de sommeil affaiblit l’immunité), manger équilibré pour avoir toutes les vitamines et minéraux nécessaires (pas besoin de pilules miracle si tu manges suffisamment de fruits/légumes, sauf cas particuliers), bouger régulièrement (l’activité physique modérée booste les défenses en améliorant la circulation et en réduisant le stress). Évite les excès de fatigue, le stress chronique (plus facile à dire qu’à faire, je sais) – le stress prolongé fait monter le cortisol qui freine nos défenses. Et enfin, stop tabac si possible : le tabagisme détruit les muqueuses respiratoires, première ligne de défense contre les virus. Un fumeur aura plus de mal à évacuer les virus de ses bronches, d’où des infections plus fréquentes et graves (sans parler du reste).

  • Vaccine-toi quand c’est possible. Certaines maladies virales hivernales ont un vaccin efficace disponible – profite-en ! Le principal, c’est le vaccin contre la grippe saisonnière : chaque année, il est adapté et diminue significativement le risque de choper la grippe (ou au moins ses formes graves). Il est recommandé surtout pour les personnes à risque (âgées, malades chroniques, femmes enceintes…), mais tout le monde peut le faire pour se protéger et protéger les autres. Alors oui, ça ne protège pas à 100% (le virus de la grippe évolue vite) et ça ne couvre pas le rhume du tout, mais c’est toujours ça de pris ! Conclusion : si une piqûre peut t’éviter une semaine au fond du lit, le choix est vite fait, non ? 😉

En combinant tous ces gestes et précautions, tu réduis drastiquement tes chances de tomber malade. Ce sont un peu les “gestes barrières” qu’on nous rabâche, mais pour de bonnes raisons : appliqués ensemble, ils forment un mur difficile à franchir pour les virus. Et même si tu ne les suis pas à la lettre en permanence (on reste humains, on va pas vivre en mode parano non plus), en adopter un maximum dès que la situation s’y prête, c’est gagnant.

Et si malgré tout tu tombes malade ? Ben, ça arrive ! On ne peut jamais éliminer le risque à 0. Dans ce cas, repose-toi, hydrate-toi, soigne les symptômes (c’est l’occasion de binge-watcher une série sous le plaid). La plupart du temps, ça passe tout seul en quelques jours car ton corps sait se défendre. Pas la peine de foncer sur les antibiotiques pour un rhume : ça ne marche pas sur les virus, et 7 jours avec ou sans traitement, le rhume durera pareil. Par contre, si ça traîne ou empire (fièvre élevée qui dure, grosse douleur localisée, gêne respiratoire…), là il faut consulter un médecin pour vérifier qu’une bactérie opportuniste ne s’est pas invitée à la fête ou qu’il ne s’agit pas d’autre chose. Mieux vaut être prudent.

Idées reçues (et tenaces) sur le rhume et le froid

Pour finir, démystifions quelques mythes courants liés à l’hiver et aux maladies :

  • « La vitamine C empêche d’attraper un rhume » – On aimerait bien ! La vitamine C est souvent présentée comme LE remède préventif (coucou les pastilles d’orange et le mythe de l’orange pressée miraculeuse). En réalité, les études scientifiques n’ont pas montré de réduction significative du nombre de rhumes chez ceux qui prennent de la vitamine C régulièrement en prévention par rapport aux autres. Toutefois, il y a un léger effet sur la durée des symptômes : en moyenne, un rhume dure un poil moins longtemps (quelques heures à un jour de moins) chez les consommateurs réguliers de forte dose de vit C. Mais une fois le rhume déclaré, prendre de la vitamine C n’a pas d’impact notable sur la guérison. Cela ne veut pas dire qu’il faut bouder les fruits ! Une bonne alimentation riche en vit C contribue à une immunité en forme, mais ce n’est pas un bouclier magique anti-rhume. Disons que ça ne fait pas de mal, mais ne vous attendez pas à une protection absolue.

  • « Le froid tue les microbes » – Ah, l’idée reçue comme quoi laisser les draps dehors en hiver tue les acariens et virus… Alors, oui et non. Certaines bactéries sensibles peuvent mourir si on les congèle, mais beaucoup de microbes, en particulier les virus, résistent très bien au froid. Le gel stoppe leur activité temporairement, mais ne les détruit pas forcément. D’ailleurs, on conserve bien des souches de virus au congélateur en laboratoire ! Pour les virus respiratoires courants, le froid est plutôt leur ami : ils survivent plus longtemps hors du corps à basse température. À l’inverse, la chaleur les tue plus vite (c’est pour ça qu’un bon lavage à 60°C peut désinfecter du linge). Donc ne comptez pas trop sur le blizzard pour désinfecter votre mouchoir 🤧. Mieux vaut utiliser du savon, du désinfectant ou la chaleur (lessive, cuisson) selon le contexte pour tuer les microbes, plutôt que le congélateur.

En démêlant le vrai du faux, on comprend que “attraper froid” est une expression trompeuse. Ce qu’on attrape vraiment, ce sont des virus (ou bactéries). Le froid, lui, joue le rôle de facteur aggravant ou facilitant, mais ce n’est pas la cause unique.

En conclusion (bien au chaud !)

L’hiver n’a plus qu’à bien se tenir : tu es armé de connaissances pour braver la saison froide sans (trop) d’encombres. La clé, c’est de respecter ton corps (le garder au chaud, bien nourri, reposé) tout en contrant les virus par des gestes d’hygiène simples et du bon sens.

Alors oui, continue de mettre ton écharpe – ne serait-ce que pour ne pas avoir le nez glacé – mais n’oublie pas que ce sont les microbes qui font les maladies, pas le thermostat.

Allez, bon hiver à toi, prends soin de toi et de ton nez (c’est un organe sensible, traite-le bien). Et n’oublie pas : la vraie cape d’invisibilité contre le rhume, c’est ton mouchoir, ton savon, et un bon bol de soupe bien chaud. Stay safe and warm!